jeudi 28 août 2014

À MES AMIS DJ, À MES AMIS CLUBBERS

Hello Les Soulplaciens,

Vous êtes nombreux à avouer une certaine fascination pour les deejays, sorte de héros modernes qui bercent vos rêves de la semaine et enflamment vos weekends. J'en vois même, ben oui je suis dj, qui mettent un point d'honneur à aller serrer la main de celui dont dépend leur soirée et parfois leur réputation. Croyez moi, ça met une sacrée pression parce qu'on marche à la passion et qu'on met bien plus de nous-même qu'il n'y parait.

Un mix, c'est plus qu'une playlist dans un ipod que l'on reproduirait le soir venu. Il contient tout ce que notre sensibilité du moment nous permet. Parce qu'on est comme vous, la pluie nous dérange, le soleil nous distrait, le froid nous aigrit et le téléphone qui sonne tout le samedi après-midi nous fout en boule. Pendant que vous choisissez les amis avec lesquels vous allez bouger, nous, on définit l'histoire qu'on va vous raconter, on choisit nos amis aussi : Ces vinyles qui doivent nous assurer la réussite de la soirée, on les jauge, retourne les pochettes à la recherche du détail qui nous aidera à écrire l'histoire. On est tous pris du même toc, on sort un disque puis on le range, et on le ressort au cas où... En tous cas on construit nos interventions avec émotion. Vous pensez que j'en dis trop ? Mais vous faites la même chose quand vous zappez un nom dans vos contacts : "parce qu'avec lui on peut pas kiffer il veut rentrer trop tôt, parce que lui boit trop ou parce qu'à chaque fois que je vais à tel endroit avec untel le videur met des lentilles en forme de sens interdit". Ce sont des émotions que vous refoulez en mettant toutes les chances de votre côté pour apprécier votre rayon de soleil de la semaine. Ce rayon de soleil auquel vous vous préparez, vaut notre sourire quand on est sûr d'avoir trouvé LE MORCEAU.
Vous ne pouvez pas imaginer ce qu'est cette transe silencieuse et intime, elle se précède souvent d'une longue période de perplexité que rien ne doit venir troubler (putain de téléphone). Cette transe arrive dès que l'on sait ou croit savoir qu'on tient le bon bout. Nos mains s'agitent frénétiquement pour sortir les disques qui feront suite à cette référence. On se jette sur les platines, on écoute, on tente des mixes et d'autres idées affluent... et c'est un joyeux bordel dans nos têtes et dans nos chambres. Comme il faut bien faire des choix définitifs, souvent guidés par la limite de notre capacité à porter X mallettes de disques, le calme revient.
Au moment où vous faites vos choix vestimentaires si importants pour voir le videur dans les yeux,  "marquer" l'esprit d'éventuelles conquêtes ou tout simplement pour vous sentir bien; nous on se "pose". On vous imagine jeunes, vieux, souriants, maussades, branchés, attentifs à ce que l'on va faire ou pas, réceptifs ou réfractaires... On a tous un pote qui vient et à qui on a promis de faire plaisir, c'est lui qui a appelé trois fois, c'est lui que l'on a oublié et que le nom sur l'écran maudit rappelle à notre bon souvenir. C'est lui qu'on déteste parce qu'on doit faire le tour de notre sélection comme on vide une valise avant le départ en vacances quand on ne retrouve plus son billet...
Les avions comme les soirées démarrent à l'heure alors plus le temps de chercher. Une grande partie de votre soirée s'est déjà jouée ce samedi après-midi. On décolle pendant que vous buvez un verre avant de venir, et quand la porte s'ouvre pour vous sur le théâtre de vos déhanchements, la lumière rouge s'allume aussi pour nous : c'est notre tour. On saute dans l'inconnu, sans filet, munis de parachutes dont on ne sait s'ils vont s'ouvrir quand viendra le trop fameux : " T'as pas un truc qui bouge ??? ". On partage, beaucoup. On prend un pied pas possible, souvent.
Et on rentre chez nous, anxieux de ne pas vous avoir déçus, heureux pour ceux dont on a pu discerner le plaisir. On vous déteste encore quand le téléphone ne sonne pas, même pour un texto qui dirait : "Merci c'était bien". Ce n'est pas par désir d'une quelconque auto-satisfaction, ça rend juste l'atterrissage moins douloureux dans ce vide que vous laissez après la dernière note, même si la télé qui nous regarde diffuse systématiquement le générique d'Histoires Naturelles.
Tous les Deejays, un tant soit peu passionnés par ce qu'ils font vous le diront, leur sélection ils la rangent religieusement; parce que grâce à vous qui les avez écoutés donner le meilleur d'eux-même, ces disques prennent un sens particulier qui nous donnent le sourire avant de rêver à la prochaine soirée.

À Tous Les Deejays, les vrais. À Tous Les Clubbers... À BORIS.

Musicalement JP